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I.V.

DAILY TRAVEL BOOK ÉMERAUDE
ILLE ET VILAINE, BRITTANY, FRANCE, 2020-21

Texts  soon .

I.V. DEETEEBEE

INSTANT UNEDITED SHOTS FROM CANCALE & AROUND
#DTB

J'ai vécu trois ans sur la côte d'Emeraude, dans un village qui s'appelle Cancale et j'ai écrit ce que j'avais à en dire pour une série que j'ai intitulée Fairies tell - les fées parlent

En lisant Christian Bobin, que j'ai découvert là-bas grâce à un fameux Boomerang d'Augustin Trapenard, en lisant Bobin des années après avoir quitté mon village, j'ai su que je ne saurais pas dire mieux ce que j'ai vécu là-bas. 

"Regarde, le vrai trou noir de l’univers est là, dans ce que tu n’as pas su voir, cette giclée d’oiseaux et l’infini qui n’attendait que toi. Incline-toi devant celui qui a tout raté pour s’être émerveillé de tout."
S'émerveiller de tout, c'est ce que fait le philosophe, et la philosophie est ma première appartenance, celle de mes longues études, et ce "thomazein" était là tous les jours à Cancale, en courant devant l'océan sur la route panoramique, en redécouvrant le paysage en continu comme si je ne l'avais jamais vu.

Dans Un Bruit de balançoire, Bobin écrit aussi "ce que j'appelle aimer, c'est remercier pour une force donnée". J'ai aimé là-bas, seule peut-être mais passionnément, au point de me demander si Dieu existait, au point de croire en lui parfois alors que je n'y crois pas : c'est l'univers qui me faisait cet effet-là. 

Dans le même livre, Bobin, qui est croyant je crois, dit que "Dieu n'est plus par instants. C'est sa plus subtile façon d'être." J'ignore de quoi il parle exactement, mais je crois que je le devine, et Bobin poursuit, toujours dans ce livre de lettres courtes intitulé le Bruit de balançoire : "la vie est ce jeu où il s'agit d'approcher au plus près de soi sans s'en apercevoir."

La Bretagne avait des secrets alors que j'avais l'impression de bien m'apercevoir que je m'approchais de moi, être sur cette route, la mienne, c'était criant et transperçant, débordant parfois, de plein dans le vide, et Bobin écrit encore, toujours dans le même livre : "on peut être parfois si présent à ce qu'on vit qu'il n'y a plus besoin de paradis". J'y étais. J'habitais là où d'autres partent en vacances, mais je connaissais les lieux du silence, désertés pendant l'année bénie, et Bobin sait dire la chose : "pour peu que nous soyons attentifs à la cellule d'air dans laquelle nous respirons, nous sommes informés du monde entier, de ses origines à sa fin."

Et c'était bien mon impression, vivre dans le monde entier depuis le vent qui couvrait mon visage lorsque tous les jours j'allais courir, être dans le monde entier au milieu des marées qui devenaient le coeur battant de la Terre depuis la lune, être dans le monde entier enfin devant l'horizon, les lumières me parlaient et je savais que je n'étais pas la seule à laquelle elles s'adressaient, ce qui rendait le sentiment plus fort encore dans la solitude : d'être et d'appartenir au monde entier.

Bobin enfin, a ravivé mes souvenirs en écrivant ce qui résume tout : "je cherche l'adresse d'un nuage. J'ai une lettre pour lui."

 

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